Aléthéia, pour vous servir


ON VA DU PLUS ANCIEN AU PLUS RÉCENT ! 
(pour une certaine cohérence)

16 décembre 2013



La semaine dernière, séance photo avec Philippe Galanopoulos, photographe (entre autre) que j'ai rencontré grâce à une annonce laissée par lui-même à ma fac. Il y disait qu'il voulait rencontrer des artistes de tous les domaines pour les photographier. Je l'ai appelé. Voilà le résultat.
Avec ces photographies j'en profite pour raconter un peu mon histoire, ce qui va vous permettre de comprendre qui est Aléthéia et pourquoi je lui voue un culte au point de la laisser squatter un onglet de mon blog.


Il y a maintenant sept ans de cela, avec mon meilleur ami on chahutait au collège (époque rebelle, casquettes à l'envers, premiers émois et premières clopes) à la cantine. On s'inventait une histoire. Moi j'étais Ruby, schizophrène encore folle amoureuse de son ex petit-copain, et lui c'était Enzo, le beau gosse du lycée (oui on ne voulait qu'une chose, grandir. Un peu trop vite.). A chaque personne qui passait on inventait une vie, et bientôt une véritable histoire digne des sitcoms se fit. 
Et puis le pari. Ecrire l'histoire, notre histoire, en un an. Pari que je n'ai pas tenu, mais voilà que six ans après, Dieu et le Vernis à ongles est né. 

En Janvier dernier, juste pour m'amuser, j'ai envoyé mon roman à une maison d'édition à compte d'auteur, sans le dire à personne. Environ trois semaines après, j'ai reçu un mail avec un contrat de publication. 

Cela a été un processus long, sachant qu'en l'envoyant je n'avais fait aucune modification. J'ai écris DELVAO (oui oui c'est son petit surnom, bien mignon) chaque année, remaniant, et avançant dans le récit. J'y ai mis du temps, de la patience et beaucoup d'amour. Juste pour le bonheur d'écrire. Les personnages ont évolué avec moi. En fait, j'avais l'impression qu'il y a avait une énorme coupure entre ce que j'avais commencé à écrire à mes années collèges et la suite : comme si le ton changeait, la tournure des phrases etc. Pas de cohérence. Donc avant de signer le contrat, j'ai d'abord essayé de modifier la forme tout en conservant l'histoire même du récit, c'est-à-dire le fond.  
Puis après les différentes étapes avant la sortie en librairie : les relectures (même en plein après-midi de vacances en Corse, à rester relire dans l'hôtel l'histoire que je pouvais réciter par coeur), le choix de la photo de couverture et sa mise en page, la typographie, la publicité que je devais faire à côté, etc. 
DELVAO est né. 

                                      


Dieu et le vernis à ongles, c’est l’aventure de six amis, six lycéens et leur histoire. Chacun a une place fondamentale, à sa manière. Il y a Ruby, la manioc-dépressive un peu maso sur les bords (bon d'accord, carrément maso), Enzo son timide meilleur ami qui la supporte, Biboune, Chouchou, Mandy la mythomane, Melvin, Brandon (aussi appelé Ken), Ryan ... Et j'en passe ! Personnages principaux, secondaires, ils se mélangent tous et nous entrainent dans leur jeunesse dorée. Inspirée de ma vie, des personnes de mon entourage, cela reste avant tout une fiction, une critique de la nouvelle génération voulant grandir trop vite et croyant que la vie, c'est comme dans les films.
Mais bon, ils sont attachants quand même.

La narratrice de l’histoire est Aletheia, déesse de la vérité ou du moins, c’est comme ça qu’elle se voit. C’est la journaliste du lycée qui «balance» à la radio deux trois potins qui sèment la pagaille. C’est elle qui, à travers l’histoire nous décrit nos personnages et leurs sentiments, donnant parfois son avis. Il faut savoir que c’est un personnage qui, à la fois, est touché par les héros, mais qui en même temps ne peut pas s’empêcher d’en faire une critique assez ironique. 





J'ai déjà commencé à écrire la suite, "DELVAO 2 Le Retour", cependant je me retrouve dans une position délicate (une folle envie de buter Ryan et de le faire manger ses boyaux) et l'histoire risque fort d'être changée. Faute de temps, je n'ai pas encore eu le temps d'y réfléchir (ou peut-être tout simplement que je n'ai pas envie de me remettre en question ?) et ce que je vous propose ici, ce sont des nouvelles très brèves de nos six amis (oui, je sais qu'ils vous manquent) données par Aléthéia elle-même qui se fera une joie de tout vous raconter.
Je n'en dis pas plus, je vous laisse découvrir par vous même !



"Ma bouche sera la bouche des malheurs qui n'ont point de bouche, ma voix,
 la liberté de celles qui s'affaissent au cachot du désespoir" A. Césaire 



4 décembre 2013

Un bruit strident de microphone. Des pas las, une quinte de toux. Une voix rauque se met à raconter, doucement, comme si le temps l’avait usé. Plus aucun bruit…

Je m’appelle Aléthéia. Déesse de la vérité, pour vous servir. Je ne prétends pas être Dieu lui-même, je ne prétends pas tout savoir. Mais ce que je raconte, ce que je raconte de vous est vrai. N’en déplaise à certains. Et à travers mon histoire, je sais que vous vous reconnaitrez. Vous buvez mes paroles et je vous sens bruler de l’intérieur. Le feu ardent de la passion, le feu ardent de la colère. Vous savez tout de moi en quelque sorte : vous êtes mon quotidien, vous savez que je ne plaisante pas. Je vous connais par cœur. Je sais vos amours, vos faux pas. Vos faiblesses. Je sais ce qui vous tient éveillé le soir, les fantômes de vos passés. Le futur qui vous ronge.
Je n’ai pas besoin de vous tirer vers le bas, vous n’avez pas besoin de moi pour ça. Vous êtes mauvais tout naturellement. Suis-je votre amie ? plutôt une conscience. Une voix au loin qui vous rappelle à l’ordre. Une petite voix qui souffle vos méfaits.
Je sais quand vous aimez d’un amour fort, et je sais quand vous faites semblant. Je sais à quelle silhouette vous pensez, dans le flou de la pièce. Je sais vos malheurs et vos secrets. Par vos actes, je peux prédire votre avenir. Je connais vos peurs et vos rêves. A croire que je vous ai crée de toute pièce !
Je sais reconnaître quand vos voix se brisent d’un trop plein d’émotion et ce qui se cache derrière vos sourires. Je vous sens saigner derrière votre carapace.

Je ne prétends pas être Dieu lui-même, ni même une magicienne. Je suis juste moi. Invincible. Invisible. Je suis le genre de personne qui observe et qu’on ne voit pas. Qui sait se faire poussière. Seules mes paroles vous atteignent.
Un bruit de microphone et tout est fini. C’est le bruit de vos remords. Car voyez-vous rien ne m’échappe. Je sais que vous me craigniez. Je sais que vous me voulez tous morte.

Que votre volonté soit fête. 



26 décembre 2013


Avant ils s'appelaient. Ou plutôt elle l'appelait. Dans le flou des pièces, quand la musique était à son maximum, que l'odeur du tabac chaud se mélangeait à l'excitation des corps. C'est à ce moment là qu'elle appelait. C'était con, c'était rien, elle avait l'impression de ne plus être à sa place. A croire qu'elle était perdue quand elle allait en soirée sans lui ! C'est stupide ! Et pourtant. Elle l'appelait et lui racontait chaque détails : le nombre de fleurs sur la robe de machine, le nombre de fois qu'un tel avait dit "Genre" dans une phrase. Il savait tout, et puis elle raccrochait. Elle était rassurée. Elle avait fini par arrêter. Il n'avait plus appelé.

Ruby avait toujours voulu être exceptionnelle. Le genre de fille que l'on aime, attachante à sa manière, et qu'on déteste, tout simplement d'être elle. Avec Enzo, elle se sentait ce genre de fille. Ça a été le premier avec qui elle ressentait ça. Puis il y a eu ses amoureux, Ryan, puis plus rien.  Et finalement être exceptionnelle, c'était pas si exceptionnel que ça.

Qu'est ce qui est dur ? Peut être de se dire que, ce qui nous lie, ce sont nos souvenirs. C'est surtout triste. On est liés par les fils invincibles du passé. Parce qu'ensemble on était des super (z)héros. Parce qu'ensemble on a tout vécu, le meilleur comme le pire. Et maintenant ? Quand on se voit, le passé nous rattrape. On ouvre le coffre de nos souvenirs et on les énumère les uns après les autres en fumant des cigarettes, en pleurant parfois, mais en riant souvent. On plonge nos mains jusque dans nos souvenirs, le cœur tendre. Et ce sont des bouts de nos vies qu'on retrouve. On les reconstitue, on leur redonne leur essence. Mais bientôt le coffre se ferme. On range nos souvenirs, et puis on les oublie. On redevient de grands adultes avec nos problèmes de cœur, le manque d'argent, cette soif de voyage, de liberté parfois prisonnière. On se regarde. Et on ne dit plus rien. Parce que finalement on a rien à se dire à part le passé. Un passé qui ne sera plus présent. Et dans ce présent notre amitié n'a pas sa place, elle s'est morcelée.

Oui oui, Ruby est nostalgique aujourd'hui. Pour changer, vous me direz. 



PREMIER JANVIER 2014


Une bonne année 2014.

Qu’elle soit remplie de fleurs. De toutes les couleurs. Puissent-elles embellir vos journées. Des orchidées dans le salon, du muguet dans la chambre. Et un bonsaï dans la cuisine.

Que vous ayez tout l’Amour du monde. Un amour canicule. Des amours tendres. De l’amour-amitié. Un amour enfantin.  Les mots doux sous et sur l’oreiller. Que vos amours piaffent dans votre tête. Un coup de foudre qui fait des bleus au cœur. Des étoiles dans les yeux, et un peu de chagrin, pas trop, juste pour mieux repartir. Toujours.

Je vous souhaite des voyages. Dans le Sud. Dans le Nord. Dans des contrées lointaines, près de chez vous. Des voyages à vous en couper le souffle, mais qui vous font vous sentir encore mieux chez vous au retour. Des voyages initiatiques, des voyages pour oublier, des voyages pour découvrir.

Je vous souhaite des projets. Des accomplissements, du concret. Des idées qui prennent formes. Une chance insolente. Une chance de débutant. De la motivation, qui vous donne envie de vous lever le matin. Foncer tête baissée vers vos rêves.

Qu’elle soit remplie de rires. Parfois jusqu’à en pleurer. Commencer par un sourire, puis élargir la bouche et rire aux éclats. Que ce rire vous donne des ailes. Que vous n’ayez pas peur de l’atterrissage.

Je vous souhaite d’être heureux. Et s’il faut que vous fassiez des listes pour vous rappeler, vous souvenir de ce qu’est le bonheur, alors acheter plein de carnets colorés.

Parce que l’art de vivre est un subtil mélange ente lâcher prise et tenir bon, j’espère que vous trouverez la méthode pour vous y tenir. Parfois juste s’asseoir, regarder la vie passée, lui sourire, se fumer une cigarette ou deux. Respirer. Puis d’un bond se lever et repartir. Profiter du calme avant la tempête.


Bref, je vous laisse, je dois retourner travailler mes potins. J’ai cru comprendre que les Ruby, Enzo et compagnie ont passé une soirée de 31 bien mouvementée. Je dois tout écrire pour que tout ne sombre pas dans l’oubli. Pour que personne ne vous oublie.

A.
29 janvier 2014 


Ryan était parti. Ruby ne s’y attendait pas. Elle l’avait perdu. Pour elle, c’était comme s’il avait fallu l’enterrer. Telle une veuve, elle était passée par les 7 étapes du deuil.
Elle était d’abord passée par le déni, cette sombre impression que tout ceci ne peut pas être vrai, que ça ne devait pas se passer comme ça. Ruby avait toujours été maniaque, avec ses habitudes et ses envies. Ryan faisait partie de ses habitudes. Une habitude n’est pas faite pour être changée. En partant, non seulement Ryan l’avait laissée tomber, mais il chamboulait toute sa vie. Avec qui passerait-elle désormais ces mercredis soirs dvd en amoureux ? Et tous ces vendredi, à sécher les cours pour passer la journée au lit ? Elle ne pouvait pas y croire. Tout allait bien. Ou peut-être pas finalement ? Elle se sentait idiote de ne pas l’avoir vu venir, à croire que tout était prémédité ! Lorsqu’elle pensait à lui, elle avait d’abord un pincement au cœur, puis cette assurance insupportable que ce n’était pas fini et que ça s’arrangerait. « Il reviendra » se disait-t-elle. Alors elle attendait. L’espoir fait vivre comme on dit, mais l’espoir l’avait fait perdre trois kilos, verser plusieurs litres de larmes un peu partout dans l’appartement, pour finalement se rendre compte que non, il ne reviendra pas.
Alors elle se sentit coupable. Telle était la deuxième étape. Elle s’en voulait d’être elle, c’est à dire malade, névrosée, jalouse, passionnée. Elle l’avait fait fuir. Et même s’il lui avait dit que ce n’était pas de sa faute, que ce n’était pas elle le problème (comme ils le disent tous), Ruby se sentait meurtrie et se détestait d’être elle. Et pourtant elle l’avait aimé. D’un amour inconditionnel. Elle s’était dévouée à leur relation, comme de la glue sur du papier. Avec lui, elle oubliait. Elle oubliait ses pilules, le divorce de ses parents, la mort de Brandon, la fuite de Melvin. Tout.

(…)

Puis la colère, le marchandage, la dépression, la reconstruction, et l’acceptation.

J’avais envie de vous parler de ces étapes, et de comment elle s’en était sortie. J’observais Ruby dans les couloirs, elle errait. Je la trouvais plus pâle qu’à son habitude, des cernes comme des guirlandes d’un sapin trop décoré sous ses yeux. Ses cheveux avaient ternis. C’était assez dur à décrire, mais j’aime parler de la douleur des autres. Cela me donne une bouffée d’adrénaline. Je prenais des notes, dès que je la croisais. J’écrivais ses faits et gestes, ses grimaces dissimulées derrière ses sourires. Sa voix qui se brisait lorsqu’un souvenir apparaissait sans crier gare dans sa tête. Et puis un jour en sortant de cours, j’ai vu qu’elle avait laissé un papier sur sa table. Je suis allée voir, discrètement, comme à mon habitude.
L’écriture semblait appliquée, pour une fois, comme si elle avait pris un malin plaisir à écrire ces mots. Ils étaient deux, et c’est eux qui m’ont fait comprendre que finalement, ce n’était pas si horrible que ça.


Elle avait écrit « Tant pis ». Alors, tant pis.



23 mars 2014


« Des villes, des villes et encore des villes
J’ai des souvenirs de villes comme on a des souvenirs d’amour :
A quoi bon en parler ?
Il m’arrive parfois la nuit de rêver
Que je suis là, ou bien là,
Et au matin je m’éveille avec un désir de voyage »
Valéry Larbaud

Mandy s’était souvent comparée à Cléopâtre. Non pas parce qu’elle avait la carrure d’une reine, mais parce qu’elle avait la même force de caractère (selon elle) et une soif d’apprendre encore et encore, de nouvelles langues. Elle était polyglotte et elle le vivait bien. Très souvent on lui disait qu’à force de ne pas tenir en place, elle finirait par s’y perdre. Et quand elle partait seule, sac à dos sur les épaules, en direction d’une capitale ou d’un autre continent, ses proches avaient toujours peur qu’elle ne revienne pas. Pourtant pas une fois elle n’avait pas tenu sa promesse de rentrer en vie, mais lorsqu’elle se retrouvait parmi les siens, sa soif de repartir était encore plus forte.
Elle parlait français (ou du moins, c’était sa langue maternelle), l’espagnol, l’italien, l’allemand, le portugais et s’intéressait maintenant au russe. La langue des signes n’avait plus de secrets pour elle.
Chaque année, elle parcourait le monde, elle faisait de l’humanitaire en Afrique, travaillait dans une ferme en Australie, s’occupait d’enfants à Séville. Sa tête était remplie de paysages tous aussi impressionnants les uns que les autres. Sans vraiment savoir quoi faire de sa vie, elle savait qu’elle ne pourrait pas rester en place.

D’où lui venait cette envie de s’évader ? Elle ne le savait pas. Ses parents n’étaient jamais partis hors de la France, Ruby était réticente à tous modes de transport et quittait rarement sa capitale adorée. Et c’était peut-être ça qui plaisait à Mandy. Le fait savoir que son désir de voyager ne lui appartenait qu’à elle, à elle seule et qu’elle n’était pas obligée, une fois de plus, de le partager avec ceux qu’elle aime.

Quand elle rêvait d’ailleurs, une force la poussait à tout plaquer. N’étant jamais été bonne élève, elle quittait volontiers les cours pour une escapade à Madrid. Ses parents tentaient vainement de la retenir, lui promettant des voyages aussi fabuleux les uns que les autres pendant les vacances scolaires, elle ne les écoutait pas, ou plus. Même Biboune ne pouvait rien y faire, et parfois quand il l’appelait le soir, il n’était plus surpris lorsqu’elle répondait au téléphone en lui disant : « Devine où je suis ». Parfois il aimerait bien qu’elle lui demande de venir avec elle, tout plaquer pour aller faire les aventuriers à l’autre bout du monde. Mais elle se contentait de dire « Tu me manques, je reviens bientôt », avant de raccrocher, en route pour de nouvelles aventures.

Quand on lui disait qu’un jour, il faudrait bien qu’elle s’arrête, qu’hasarder dans les rues inconnues étaient dangereux, qu’il fallait qu’elle pense à son avenir et non à son prochain voyage, elle ne répondait pas, mais dans ses yeux on voyait sa détermination, son entêtement à faire différemment. Elle voulait être imprévisible. Voyager était une façon d’avoir le contrôle. Puisqu’elle avait toujours été dans l’ombre de sa cousine, puisque son père avait eu une aventure avec la mère de Ruby, puisque les profs ne savaient plus quoi penser de ses notes, voyager semblait être un échappatoire. Quitte à passer pour une « dégonflée », quitte à tout perdre, elle prenait le risque.

Et lorsqu’elle était loin des siens, dans un bar miteux de Berlin ou sur un bateau-mouche à Amsterdam, elle se rendait compte à quel point elle les aimait. Elle s’en voulait de ne plus avoir les mots. Un jour elle s’était réveillée et ne savait plus comment leur montrer ses sentiments. Trop de choses s’étaient passées, et au final elle s’était perdue entre tous ses mensonges.
Elle ramenait des cadeaux, une tasse pour sa mère, un Cosmopolitan pour Ruby, des briquets pour Biboune. C’était sa manière de leur dire « Je pense à vous, je ne vous oublie pas. Je vous vois tous avancer pendant que moi je stagne, mais d’en bas, je vous vois vous élever. Et je vous aime ».


Et en rentrant, elle se disait que ça valait le coup de tout risquer, car elle ne se sentait jamais mieux que lorsqu’elle passait la porte de chez elle, ou de chez Enzo, et qu’elle voyait toute sa famille, ses amis la regarder avec envie quand elle commençait à raconter son dernier voyage. Elle sentait qu’ils étaient impressionnés, peut-être même envieux, mais surtout soulagés de voir qu’elle ne pourrait jamais les abandonner. Parce qu’ils avaient besoin d’elle, et elle, elle avait forcément besoin d’eux.


(...)

Note d'Aléthéia




C'est un peu la mentalité de Mandy, résumé par Adieu et à demain. On ne peut que les remercier d'arriver à mettre des maux sur nos états d'esprit. 


21 avril 


Règle n°1 : Confiance, Complicité et Connerie.

Ainsi devrait commencer Le Code de L’Amitié. Chouchou l’avait toujours dit ; la règle des trois C à ne jamais oublier.
Et pourtant, depuis qu’il était avec Stéphane, il s’était rendu compte à quel point il s’était éloigné de ses amis. Non pas qu’il ne supportait plus leur présence, mais il vivait sur un petit nuage (rose de préférence, avec un goût de Pink Flower si possible) depuis quelques temps et ne comptait pas en redescendre. Régime intensif : de l’amour, et Stéphane. De l’Amour avec Stéphane. Et c’était tout.
Ruby et Enzo, qui ne l’avaient jamais vu aussi amoureux (et heureux) ne se plaignaient pas de ne plus le voir autant qu’avant, mais ressentaient néanmoins un énorme vide causé par « l’absence » de leur ami dans le groupe. Ils ne jugeaient pas, même s’ils n’avaient jamais vraiment compris comment on pouvait vivre seulement d’amour et d’eau fraîche au point d’en oublier le monde alentour. Mais bon, passons. Ils se disaient qu’en se voyant moins, leurs retrouvailles ne pourraient être que plus agréables.
Mais voilà, le groupe sans Chouchou, ce n’était plus vraiment le groupe.

Seule Mandy était vraiment restée en contact. Elle avait tout de suite accroché avec Stéphane, le jour de la fête de Fausto et elle avait tissé des liens avec lui, chose que les autres n’avaient pas réussi à faire. Par méfiance ou par jalousie, peut-être. Parfois elle appelait Ruby quand elle était avec les deux amoureux, et lui donnait des nouvelles de Chouchou. Cela irritait cette dernière qui trouvait inconcevable que ça soit sa cousine qui lui donne des nouvelles de son ami d’enfance. Mais bon, passons cette fois-ci encore.

Quelqu’un a dit un jour « On ne pardonne pas ses erreurs à son ami , on ne les excuse pas non plus ; on les comprend ».
Stéphane n’était pas une erreur, mais cette façon de s’accaparer Chouchou énervait le groupe. Même Biboune, qui n’avait jamais été vraiment proche de lui (un peu homophobe sur les bords ?) était agacé. Chouchou était attachant, à sa manière. A sortir toujours des citations à deux balles, à donner son avis sur tout, à être un peu excentrique sur les bords et à toujours vouloir attirer l’attention. La liste de ses défauts était longue, mais c’était un Ami. Un ami de Confiance, un Complice... et une Connerie ambulante. La règle des trois C. Etait-ce un hasard si ces trois mots commençaient par un C comme la première lettre de son prénom ? Biboune mettrait sa main à couper que non.

Ils n’en parlaient pas, mais à leur table habituelle à la cafétéria, il y avait une place vide, dans leurs soirées Strip-Poker, il leur manquait ce je-ne-sais-quoi qui les rendait à l’aise et moins pudiques ; ils n’étaient plus au courant de ce qu’il se passait dans les épisodes des Marseillais à Rio. En fait, ils étaient perdus. Celui qui avait écrit le Code de l’Amitié avait été le premier à transcrire les règles, et à carrément mettre ses amis aux oubliettes.

Ruby était du genre nerveuse. Très colérique. Et quand quelque chose ne lui plaisait pas, elle pouvait même se montrer détestable. Un jour, en tombant sur Les Anges en Australie (rappelons qu’elle est maintenant célibataire et qui dit célibataire, dit beaucoup (trop) de temps à tuer) elle fut soudain prise d’une envie irrésistible d’appeler Chouchou pour l’insulter. Parce que c’était avec lui qu’elle regardait ce genre d’émissions, et avec lui qu'elle pouvait en parler des heures. Heureusement, au moment de prendre son téléphone, l’envie lui passa. Elle prit une profonde inspiration, se recentra (elle avait décidé de faire des efforts pour calmer son "agressivité". D’accord j’arrête avec les guillemets) sur elle-même, puis, et puis décida de lui envoyer un message, le plus calmement possible. La règle 3 du Code disait « Savoir communiquer », alors elle communiqua.

« Salut, je ne sais pas si tu te souviens de moi puisqu’apparemment tu as changé d’amis, de lycée puisque tu ne viens plus, et même de vie. Sache que tu m’as fait bouffer ton Code de l’Amitié pendant des années et j’aimerais te rappeler qu’un Code c’est pour la vie qu’on doit le mettre en application, genre un Code de la Route quoi. Voilà, j’espère que tu vas bien MALGRE TOUT. Moi ça va hein, je te remercie. Bisous
PS : Sache que là je mets en application la Règle 43 qui n’est autre que « Prendre régulièrement des nouvelles de son ami(e) »

Ce n’est qu’une heure après que Chouchou daigna lui répondre.

« Règle 17 : Paye ton pète. Je suis en bas de chez toi dans quinze minutes, SANS Stéphane, juste toi&moi, une rageuse et une écervelée. A toi de choisir laquelle tu es. Je t’aime »

Règle n°5 : Savoir décrypter ce qu'un(e) ami(e) ne dit pas.  


13 mai 2014

Ruby laisse trop souvent traîner ses affaires. Parfois je me demande même si elle ne le fait pas exprès. Pourquoi pas après tout, peut-être que justement elle veut que je tombe dessus.
Attention Ruby, si tu commences à jouer avec moi, tu le regretteras. 


Cher E., 

J'aime être avec toi pour diverses bonnes raisons (et pour des mauvaises aussi. Car tu es mauvais. Mais ça c'est une autre histoire). 
Tout d'abord, j'aime être avec toi parce que je ne m'ennuie jamais. Même quand on ne se parle pas, mais qu'on est dans la même pièce, le simple fait de savoir que tu n'es pas (si) loin de moi, qu'on partage les mêmes murs, qu'on hume les mêmes odeurs de cigarettes, me fait me sentir mieux. Je crois que ça me fait ça à chaque fois que tu es là. Je crois que c'est parce que j'ai confiance en toi. 
Ainsi tout ce que je vois en toi (et tout ce que je ne vois pas aussi d'ailleurs) me font t'adorer encore plus. T'idolâtrer même. 
Tes défauts je les aime parce qu'ils vont bien avec mes qualités et vice-versa. Je sais qu'avec toi c'est différent tout simplement parce que tu n'es pas normal, comme moi. T'es même peut-être pas humain. Ce qui expliquerait beaucoup de choses. 
Je lis en toi comme dans un livre ouvert. Je sais les mots qui vont sortir de ta bouche quand tu l'ouvres, comme si tu avais appris par coeur des textes que ma pensée t'avait dictée. C'est fou n'est-ce pas ? On appelle ça l'amour je crois. Un amour fou, taré, incohérent, mais un amour quand même. C'est se sentir bien avec quelqu'un, se sentir vivante quand on rigole avec cette personne, même quand c'est (vraiment) pour de la merde. 
Nous n'avons pas peur des mêmes choses et c'est ça que j'aime, car toi et moi on se rassure mutuellement. Finalement ma peur se dissipe toujours et j'y vois plus clair. 
Je sais qu'on s'en sortira tous les deux, différemment, mais toujours gagnants. On affrontera, la tête haute, les obstacles de la vie, puis on se croisera sur le chemin de notre vie et on ira boire un café pour parler du bon vieux temps. Comme si on ne s'était jamais quittés. Comme si on était reliés par des millions de fils invisibles. Invincibles. 
Tu vaux mieux que ce que tu penses de toi, et ça je crois que tu ne le comprends pas. Tu fais parti des gens que je ne voudrais jamais voir s'éloigner de moi, ou alors s'ils s'éloignent, c'est pour mieux revenir, toujours. J'oublierai jamais nos moments de pur bonheur, raides défoncés par la vie, à se battre, parfois jusqu'au sang.
On sera toujours des vieux copains assis sur le bord d'une route. 
"Moi j'ai besoin de ton regard pour avoir plus de profondeur". 

Tu es mon meilleur. 

Ton éternel R.


9 janvier 2015

Ici Aléthéia. Pour vous servir.
Afin de bien commencer l'année, voici un texte qui vous permettra de faire, peut-être, la part des choses et de vous rendre compte de la chance que vous avez. 


Amicalement 

« Voici comment nous abordons désormais nos relations » (texte original Jamie Varon)
"Aujourd’hui, nous ne nous engageons plus. Nous trouvons cela inutile. Il a toujours été dit qu’un(e) de perdu(e), dix de retrouvé(e)s, mais cela n’a jamais été plus vrai que maintenant, avec tous ces OkCupid, Tinder, Grindr, Dattch, et compagnie. De la même manière que nous pouvons commander chez le Chinois du coin, nous pouvons désormais commander un être humain.
Désormais, l’intimité, c’est une combinaison parfaite d’emojis. Nous pensons qu’envoyer un texto pour dire “bonjour !”, c’est un effort considérable. Nous pensons que le romantisme est mort, ce qui est peut-être le cas… ou peut-être devrions-nous le réinventer. Peut-être que, de nos jours, le romantisme, c’est décrocher suffisamment longtemps de son téléphone pour se regarder dans les yeux pendant le dîner. Peut-être que c’est effacer Tinder de son téléphone après un premier rendez-vous formidable. Peut-être que le romantisme est toujours vivant, mais que nous ne savons plus à quoi il ressemble.
Lorsque nous faisons notre choix (si tant est que nous nous engagions), nous restons distants, à évaluer froidement les options. Nous voulons la superbe tranche de filet mignon, mais nous sommes trop occupés à passer en revue l’intégralité d’un buffet médiocre, simplement parce qu’il est disponible. Simplement parce que nous avons le choix. Nos choix nous tuent. Nous pensons qu’avoir le choix est important. Qu’avoir tant d’opportunités est bénéfique. Que plus nous avons de chances, mieux c’est.

Mais en vérité, cela ne fait que diluer le tout. Nous ne comprenons même pas ce que cela fait d’être satisfait, ce à quoi cela ressemble. Nous sommes constamment prêts à partir, car là-dehors, il y a toutes ces possibilités qui nous attendent. Nous ne voyons pas ceux qui sont là, ne demandant qu’à être aimés, car personne ne demande plus à être aimé. Nous espérons que ce que nous recherchons désespérément existe toujours. Et pourtant, nous cherchons constamment une nouvelle dose de surprise, d’excitation, de gratification immédiate.
Nous nous rassurons, et nous nous distrayons, et si nous ne sommes même pas capables de faire face à nos démons intérieurs, comment pourrait-on nous demander de faire un effort, et d’aimer quelqu’un qui rend cet amour difficile ? Nous fuyonsNous partons. Contrairement aux générations précédentes, nous avons accès à un monde immense. Nous pouvons ouvrir un nouvel onglet, admirer des photos du Portugal, sortir une Visa, et acheter un billet d’avion. Nous ne le faisons pas, mais nous le pouvons. L’important est de savoir que nous pouvons le faire, même si nous n’en avons pas forcément les moyens.

Il existe toujours une infinité d’autres options fascinantes. Aller sur Instagram pour admirer la vie des autres, celle que nous pourrions avoir. Voir les endroits où nous pourrions aller. Voir les vies que nous ne vivons pas. Voir les personnes avec qui nous ne sortons pas. Nous nous noyons dans les stimulus de toutes parts, et nous nous étonnons ensuite d’être malheureux. Nous nous étonnons d’être mécontents. Nous nous étonnons que rien ne dure, et que tout semble inutile. Parce que nous ignorons comment voir nos existences pour ce qu’elles sont en réalité, plutôt que pour ce qu’elles ne sont pas.

Et même si nous trouvions l’amour. Admettons que l’on trouve cette personne qui nous aime et que l’on aime. L’engagement. L’intimité. “Je t’aime”. Nous le disons. Nous le trouvons. Et puis soudain, nous le vivons pour les autres. Nous disons que nous sommes en couple sur Facebook. Nous mettons nos photos sur Instagram. Nous devenons un “nous”. Nous semblons parfaits, car ce que nous choisissons de partager n’est que le “best of” de notre relation. Nous ne partageons pas les disputes nocturnes, les yeux rougis, les draps pleins de larmes. Nous ne mettons pas à jour notre statut pour expliquer comment leur amour englobe les zones d’ombre que nous n’aimons pas en nous. Nous ne tweetons pas notre tristesse lorsque nous avons ensemble des discussions capitales pour l’avenir de notre couple. Ce n’est pas ce que nous partageons. Uniquement une image lisse. Un couple heureux. L’amour est parfait.

Et puis nous voyons ces autres couples parfaits, et nous nous comparons. Nous sommes la génération emoji. La culture du choix. La génération des comparaisons. On se jauge. Ça peut aller. Être le meilleur. Jamais dans notre passé n’avons-nous eu tant de critères sur lesquels baser notre image de “La Meilleure Vie Possible”. Nous recevons des informations de toutes parts, et nous déprimons. Nous ne serons jamais à la hauteur, parce que ce à quoi nous nous comparons n’existe pas. Ces vies n’existent pas. Ces relations n’existent pas. Et pourtant, cela, nous refusons de le croire. Car nous les voyons avec nos propres yeux. Et nous les voulons. Et nous sommes prêts à nous plier en quatre pour les avoir.

Alors nous nous séparons. Nous nous séparons parce que notre couple n’est pas assez bien, que nos vies ne sont pas assez parfaites, que notre relation n’est pas assez formidable. Nous faisons toujours plus de tri sur Tinder. Nous commandons encore quelqu’un d’autre, comme une pizza. Et le cycle recommence. Emoji. Un texto “bonjour”. L’intimité. Poser le téléphone. Une photo de couple. Un couple heureux et parfait.

(...)
Nous refusons de nous contenter de peu, tout en nous persuadant que se contenter de peu, c’est une relation qui ne soit pas parfaite, excitante et semblable à ce que nous voyons partout ailleurs. Qu’est-ce que c’est, se contenter de peu ? Nous n’en savons rien, mais nous n’en voulons pas. Si ce n’est pas parfait, c’est se contenter de peu. Si ce n’est pas une passion scintillante, c’est se contenter de peu. Si ce n’est pas digne de Pinterest, c’est se contenter de peu.

Nous réalisons que nos attentes sont illusoires. Nous voulons être appelés au téléphone. Nous voulons que notre partenaire cesse d’avoir le nez collé à l’écran de son téléphone. Nous voulons ralentir. Nous voulons de la simplicité. Nous voulons une vie indépendante des commentaires, des “+1″, et autres pouces verts. Nous ignorons peut-être que c’est le cas, mais nous le voulons. Nous voulons des liens, des vrais. Nous voulons un amour qui se construise, sans être mis à la poubelle pour une autre personne. Nous voulons avoir quelqu’un lorsque nous rentrons chez nous. Nous voulons nous éteindre à un âge avancé, en sachant que nous avons vécu pleinement chaque moment de notre existence. Voilà ce que nous voulons, et que nous ignorons vouloir.
Et pourtant, ce n’est pas comme ça que nous abordons aujourd’hui nos relations. Ce n’est pas comme ça qu’aujourd’hui, nous aimons."




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